Je l’ai senti dès qu’ils ont débarqué. J’ai eu une sorte de prémonition avec des sueurs froides, un cauchemar à demi-éveillé, où on ne sait plus bien ce qui est réel et ce qui ne l’est pas. Et lorsque je suis sorti de ma torpeur, j’ai réalisé avec effroi que le cauchemar avait eu lieu pour de vrai : les majors nous avaient une nouvelle fois pris pour des vaches à lait !
Ah, qu’est-ce que j’ai été con, à vingt ans ! L’époque où les DVD commençaient à devenir abordables, où on pouvait enfin trouver de bons films au format numérique pour un tarif légèrement inférieur à une passe au bois de Boulogne ! L’époque où, voulant me constituer une petite filmothèque sympathique et par la même occasion montrer à la face du monde mon pouvoir d’achat tout récent, j’achetais quasi-aveuglément et avec une honnêteté sans faille un bon paquet de galettes estampillées Warner ou Universal, renflouant à moi tout seul la moitié des caisses des majors, qui, déjà, vociféraient contre la hausse du piratage et le soi-disant effondrement de leur ventes.